Les JO 1972 de Munich vus par Jean-Pierre Cordebois

APRÈS MEXICO EN 1968, me voici de retour…

Entraînement K1 sur la Marne. — Coll. Cordebois

Jean-Pierre Cordebois est né le 28 septembre 1944 à Chantenay Saint-Imbert (Nièvre). 
Son club  de toujours est le Canoë Club Nivernais (CCN). 
Il a été Professeur de « Mécanique des Milieux Continus » à l’École Normale Supérieure de Cachan, puis au Conservatoire National des Arts et Métiers de Paris jusqu’à la retraite. 

 

 

 

 

Mon palmarès complet jusqu’en 1976 :

– Championnats du monde Juniors 1963 : 7e en K1 et 3e en K4.
– Championnats du monde Seniors 1966 : 9e en K2 avec Jean Boudehen.
– Championnats de France (titres) :
K1– Juniors : 1962 en 5 000 m, 1963 en 500 m et 5 000 m.
K1– Séniors : 1965, 1966 et 1969 en 500 m, 1000 m et 10 000 m, 1967 en 1 000 m et 10 000 m, puis 1970, 1972 et 1974 en 10 000 m.
K2– Juniors : 1963 en 500 m.
K2– Séniors : 1972 et 1974 1 000 m.
K4– Séniors : 1967, 1969, 1970, 1971, 1972, 1974, 1975 et 1976 en 1 000 m.

 

MUNICH 1972 : NOTRE COURSE EN K2 AVEC DIDIER NIQUET

Les JO de MUNICH ont eu lieu il y a 51 ans, mes souvenirs sont quelque peu flous. Seuls les ceux concernant les terribles incidents qui s’y sont passés restent intacts, ainsi que ceux concernant notre parcourt durant cette compétition.  Nous l’avons préparée durant plusieurs années, dans des conditions pas toujours en rapport  avec les enjeux.

Petit clin d’œil à l’équipe de France de 1972. Premier-plan : Yvon Petit (mari de F. Gaud), F. Gaud, D. Niquet, M. Colombe (Epouse du président), G. Delacroix et JP. Cordebois. Arrière-plan : JF. Millot et JC. Le Bihan — Coll. Cordebois

Notre équipage a été constitué environ six mois avant les JO. Initialement Didier Niquet et moi préparions chacun de notre côté la course de K1. Étant de valeurs sensiblement égales, il était bien difficile de prévoir qui serait sélectionné et qui resterait chez lui. D’où l’idée d’un K2.

Après pas mal de péripéties, nous nous sommes retrouvés à l’INSEP pour une préparation de huit mois durant lesquels nous avons effectué 3 000 km en bateau. Pour moi c’était inédit. Habituellement, mon entraînement annuel variait entre 1 000  et 1 500 km suivant mes disponibilités.

Cordebois-Niquet en série du K2 1000 m devant un public dense. — Coll. Cordeboi

Les résultats aux compétitions internationales préparatoires n’ont pas été très probants : une seule finale sur le bassin de Choisy-le-Roi où nous faisons 5e. De quoi douter.

Aux JO il y avait 25 K2 engagés dont 6 équipages des « Pays de l’Est » qui dominaient très largement les compétitions internationales. Ce sera encore le cas à l’occasion de ces olympiades puisque sur les 21 médailles mises en jeu, 18 seront acquises par ces pays, l’URSS (ex-Russie) à elle seule remportant 6 médailles d’or sur 7. Aujourd’hui, les raisons de cette domination outrancière sont bien connues.

Dans ce contexte, accéder à la finale était le seul objectif raisonnable. Afin d’optimiser nos chances, comme beaucoup d’équipes nous avons décidé de passer par les repêchages. Nous remportions le nôtre en contrôlant la course et en réalisant le meilleur temps de trois repêchages.

Cordebois-Niquet en demi-finale. — Coll. Cordebois

En demi-finale les K2 russe et autrichien ne nous paraissaient pas accessibles, seule la dernière place qualificative semblait possible. Parmi les trois autres équipages seul le K2 espagnol qui s’entraînait depuis un an avec l’équipe roumaine nous inquiétait. Nous décidions de ne pas nous soucier des autres bateaux et de faire notre course : un premier 500 m prudent, sans se faire trop décrocher, et un deuxième au maximum de nos capacités. Durant nos derniers entraînements nous avions travaillé cette stratégie. Pour nous, l’essentiel était d’aller au bout de nos limites afin de ne pas être déçus, quel que soit le résultat. Nous nous sommes qualifiés en devançant le K2 espagnol de 25 dixièmes de seconde, améliorant d’environ 5 secondes notre temps de repêchage. À ce stade, pour nous ces JO étaient déjà réussis.

Comme prévu, les six K2 des « pays de l’Est » s’étaient qualifiés pour la finale. Une fois encore nous ne voulions pas avoir de regrets, aussi nous avons adopté la même stratégie, ne pas nous occuper des autres, faire notre course en essayant de réaliser le même temps qu’en demi-finale. Après un faux départ, c’est ce qui s’est passé à une seconde près, comme tous les finalistes, nous avons mis une seconde de plus que notre temps de demi-finale. Nous avons terminé 6e derrière cinq pays de l’Est, devançant les Autrichiens d’un dixième de seconde, les Allemands de l’Ouest et les Bulgares.

Vu le niveau élevé, nous ne pouvions faire mieux dans une course très rapide où nous avons passé la ligne d’arrivée à moins d’une seconde des Roumains et où les champions du monde en titre terminaient 4e.

Pour Didier et moi, ces JO ont été une belle satisfaction, nous sommes arrivés en forme juste à temps et nous avons donné le maximum. Ça restera à jamais un excellent souvenir.

Un des membres du commando palestinien brandissant une arme. — Coll. Cordebois

Bien entendu, nous ne pouvons oublier la tragique prise d’otages israéliens par un commando palestinien. Je ne m’étendrais pas sur cet épisode largement relayé par les médias. Malgré le caractère gravissime de la situation et l’impact sur notre mental, nos courses n’ont été reportées que d’une seule journée. Je tire mon chapeau à l’organisation pour sa bonne gestion de crise.

 

Jean-Pierre CORDEBOIS (janvier 2024)

Témoignage recueilli par Jean-Paul Cézard

 

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